La réussite au CAFIPEMF exige des engagements multiples. Ici, je vais m’attacher aux ouvrages, aux textes plus ou moins généraux qui ont pu alimenter ma réflexion théorique. La lecture de l’ensemble de ces livres n’offre pas de garantie de réussite. Et il est possible de réussir sans lire ces livres. Il s’agit avant tout d’un regard personnel qui, peut-être, pourra guider quelques candidats.
De votre côté, vous aurez bien entendu des ouvrages relatifs à la thématique votre mémoire. Mais vous serez attendus également sur des thématiques voisines et plus éloignées. Il est attendu du futur formateur une capacité à se décentrer de ses propres pratiques. À vous d’en montrer quelques prémisses !
Sommaire :
L'innovation pédagogique, André Tricot
L’apprentissage en construction et Le savoir en construction, Britt-Mari Barth
Pour une enfance heureuse, Catherine Gueguen
Langage et école maternelle, Mireille Brigaudiot
L’enfant et les écrans, l’Académie des sciences
Les 7 malentendus capitaux, Roland Goigoux
Apprendre à lire, Stanislas Dehaene
Le multi-agenda, Dominique Bucheton et Yves Soulé
L'accompagnement professionnel des jeunes enseignants, Jean-Louis Lamaurelle, Thierry Gervais et Hélène Lapeyrère
Former les enseignants, Luc Ria
Texte de Kierkegaard traduit par Britt-Mari Barth
L’innovation pédagogique, Retz, collection Mythes et réalité, par André Tricot
L’auteur : André Tricot est professeur en psychologie à l’INSPE Midi-Pyrénées. D’une manière générale, je conseille tous ses ouvrages et toutes ses conférences. Certaines sont disponibles sur Youtube. Il interroge de nombreuses idées reçues avec intelligence et avec l’appui de sources scientifiques elles-mêmes analysées.
L’ouvrage : il questionne certains mantras plus ou moins récents comme « Il faut inverser la classe », « Faire manipuler permet de mieux comprendre » ou
« les élèves apprennent mieux quand ils découvrent par eux-mêmes ». Ce livre me semble indispensable car il questionne des idées reçues et souvent courantes.
Il pose des distinctions claires entre certaines notions, comme «mise en activité des élèves» et « la mobilisation des élèves». Les conclusions proposées sont
fines et méritent d’être lues et relues.
Pour aller plus loin, André Tricot dirige la collection « Mythes et réalités ». Des ouvrages comme « Apprendre avec le numérique », « Enseigner ça s’apprend »
ou « Les neurosciences en éducation » méritent très largement d’être lus.
Pour le référentiel du formateur : apports pédagogiques généraux
Quelques citations :
L’apprentissage en construction et Le savoir en construction, Retz, par Britt-Mari Barth
L’auteur : Britt-Mari Barth est professeure émérite à l'Institut supérieur de pédagogie de l'Institut catholique de Paris.
Les ouvrages : certains peuvent les juger anciens, je pense qu’ils ont le mérite de poser des bases conceptuelles très solides. J’ai 30 pages de notes sur ces deux livres… Si Britt-Mari Barth donne à réfléchir sur ce qu’est le savoir, sa construction chez l’enfant. Le futur formateur pourra faire des parallèles utiles en pensant aux futurs stagiaires ou professeurs débutants qu’il aura à accompagner. À lire en se dégageant du temps. Si les deux livres sont particulièrement intéressants, j’ai été plus marqué par Le savoir en construction.
Pour le référentiel du formateur : apports pédagogiques généraux, accompagnement de l’individu
Quelques citations :
Pour une enfance heureuse, Robert Laffont, par Catherine Gueguen
L’auteur : Catherine Gueguen est pédiatre, spécialisée dans le soutien à la parentalité.
L'ouvrage : je l'ai découvert grâce à une conférence de Viviane Bouysse, inspectrice générale, au sujet du programme maternelle 2015. Catherine Gueguen part d’études scientifiques illustrant l’importance de l’empathie et plus généralement d’éléments expliquant le fonctionnement du cerveau chez l’enfant. L’ouvrage pose des bases scientifiques et également des éléments, des conseils pratiques simples à comprendre du côté de l’adulte. Là aussi, le futur formateur pourra faire d’utiles parallèles dans sa future relation avec les enseignants débutants (cf citation 3 par exemple)... Pour aller plus loin, il sera intéressant de lire Les mots sont des fenêtres de Marshall B. Rosenberg qui explique les bases de la communication non violente, évoquées par Catherine Gueguen.
Pour le référentiel du formateur : connaissance de l’enfant, accompagnement de l’individu
Quelques citations :
Langage et école maternelle, Hatier, par Mireille Brigaudiot
L’auteur : Mireille Brigaudiot a participé à la rédaction du programme maternelle de 2015. Elle est maître de conférences en sciences du langage.
L'ouvrage : il est tout simplement à lire pour les enseignants exerçant en maternelle et indispensable pour un mémoire portant sur le langage au cycle 1. Il analyse les différents domaines du langage, oral et écrit, avec des propositions concrètes, des principes de travail. Il met en garde contre certains écueils. Il montre ce qu’est un enfant prioritaire et comment lui apporter de l’aide.
Pour le référentiel du formateur : connaissance de la maternelle
Quelques citations :
L’enfant et les écrans, par l’Académie des sciences
L'ouvrage : il offre un regard analytique et des conseils selon l’âge des enfants et sur les différents types de contenu d’écrans. Devant un écran, nous pouvons créer, lire, jouer, regarder des contenus dont la qualité est vaste. Si le titre peut sembler réducteur, l’ouvrage invite le lecteur à différencier les différents types d’usages et de contenus. La typologie selon les âges porte la marque de Serge Tisseron qui a participé à la rédaction de ce rapport et qui déconseille l’exposition passive et prolongée avant 3 ans et « sans présence humaine interactive et éducative ». Les repères « 3-6-9-12 » se retrouvent sur son site
Le rapport insiste sur l’alternance virtuel/réel avec la présence de l’adulte qui doit inciter l’enfant à « parler de ce qu’il voit sur les écrans, car cela l’incite à mobiliser son intelligence visuelle et spatiale et son intelligence narrative ». Il pointe également une éducation précoce à l’autorégulation. Ce rapport me semble indispensable pour les formateurs qui s’intéressent de près ou de loin au « numérique ». Ses analyses et ses conseils apportent un regard éclairé très utile.Pour le référentiel du formateur : rapport au numérique
Quelques citations :
Les 7 malentendus capitaux, par Roland Goigoux
L’auteur : Roland Goigoux est professeur des universités spécialiste de l’enseignement de la lecture. Il a produit de nombreux ouvrages pratiques et de très grande qualité à destination des enseignants en compagnie de Sylvie Cèbe : Phono, Catégo, Lector & lectrix, la collection Narramus. La lecture de l’introduction de ces manuels et l’accompagnement des séances sont très riches d’enseignement pour l’enseignant et le formateur. Les interventions de Roland Goigoux et/ou de Sylvie Cèbe, disponibles sur Internet (Youtube, site de l’IFE par exemple) sont très éclairantes et également riches d’enseignement. La conférence « Quels savoirs utiles aux formateurs » est à voir et à revoir pour tous les futurs formateurs, elle explicite les « cinq focales pour analyser une pratique d’enseignement »
Apprendre à lire à l’école co-écrit avec Sylvie Cèbe est un livre court présentant des travaux et ses idées sur l’apprentissage de la lecture et peut être bien utile à certains futurs formateurs (et bien entendu aux autres enseignants).
L'intervention : elle a eu lieu en 1998 pour un forum sur l’école maternelle. Le contenu dépasse largement cette date ancienne et le simple cadre de la maternelle. Par exemple, montrer que l’on peut éprouver du plaisir dans le travail et éviter une séparation entre le plaisir et le travail (cf le "flow" chez Britt-Mari Barth), comprendre que l’élève peut être motivé « par le plaisir de mesurer ses progrès, de savoir ce que l’on fait et pourquoi on le fait » et pas seulement par des artifices peut être bien utile également en élémentaire et après... Roland Goigoux explore ainsi des pensées répandues sur l’école et les élèves et apporte des analyses bien utiles. Voici quelques exemples de ces pensées répandues : il faudrait une pédagogie « fun » pour motiver les élèves, habiller au maximum les tâches scolaires, varier très souvent et rapidement les paramètres d’une tâche…
Pour le référentiel du formateur : apports pédagogiques généraux pour l’intervention, accompagnement et observation/analyse pour la conférence « Quels savoirs utiles aux formateurs ».
Quelques citations :
Apprendre à lire – des sciences cognitives à la salle de classe, Odile Jacob, sous la direction de Stanislas Dehaene
L’auteur : Stanislas Dehaene est un psychologue cognitiviste et neuroscientifique. Il est actuellement président du conseil scientifique de l’Éducation nationale. Il est, entre autre, professeur au collège de France à la chaire de psychologie cognitive expérimentale. Il a écrit également Apprendre ! Les talents du cerveau qui devrait intéresser les futurs formateurs.
L'ouvrage : il fait le point sur l’apprentissage de la lecture, sur l’importance de la conscience phonologique, la maîtrise du code alphabétique, du geste d’écriture qui sont tous liés à l’entrée dans la lecture. Il s’intéresse également aux enfants issus de milieux défavorisés et sur ce qui peut les aider dans l’apprentissage de la lecture. La musique et certains jeux vidéos peuvent apporter un soutien important.
L’ouvrage propose également un « principe de progression rationnelle » pour l’étude des graphèmes où les premiers étudiés sont soit les plus fréquents ou avec une correspondance régulière entre le graphème et le phonème. Il est aussi question du passage d’une compréhension explicite vers l’implicite. L’ouvrage pose des principes de choix rationnels des exemples et des exercices (choix des mots avec ce qui a été appris, s’interdire de présenter des mots erronés, distinction entre le nom et le son des lettres…). Il expose d’autres principes, d’autres règles qui sont d’abord des « hypothèses de travail, que l’expérimentation seule peut valider ou réfuter ». Il est présenté également une expérimentation menée en 2010-2011 dont les « résultats restaient très inférieurs à nos attentes » : « il est difficile de passer du laboratoire à la salle de classe, particulièrement dans les milieux défavorisés ». Il est alors question du rôle primordial de la formation des maîtres qui semble être la clé de la réussite ou de l’échec d’une intervention.
Pour la petite histoire, cet ouvrage présente une application « Graphogame » qui n’était alors pas disponible en France. L’intérêt de cette application est de proposer, sur un temps limité, une série de jeux sur la correspondance graphème/phonème et ainsi de permettre aux enfants de s’entraîner sur un nombre important d’occurrences. Son absence en France m’a incité alors à construire des premiers jeux interactifs sur mon propre site en phonologie et sur la connaissance des lettres. Ces jeux ont servi de base à mon propre mémoire CAFIPEMF.
Pour le référentiel du formateur : apports pédagogiques, accompagner l’individu et le collectif
Quelques citations :
Les gestes professionnels et le jeu des postures de l’enseignant dans la classe : un multi-agenda de préoccupations enchâssées, Dominique Bucheton et Yves Soulé
Les auteurs : Dominique Bucheton est professeure honoraire des Universités. Yves Soulé est maître de conférence à l'université de Montpellier. Vous retrouverez des informations plus détaillés dans Les gestes professionnels dans la classe par Dominique Bucheton.
L'ouvrage : je n'ai pas retrouvé mes notes, j'avais visionné avec attention une conférence vidéo passionnante de Dominique Bucheton autour du "multi-agenda". Vous retrouverez les informations essentielles en ligne avec "Education & didactique" Le multi-agenda concerne l'ensemble des préoccupations d'un enseignant dans sa classe. Il doit ainsi "piloter" une séance, mettre en place une atmosphère propice aux apprentissages, établir du lien entre les différents éléments en faisant du "tissage"... L'enseignant, tout comme les élèves, adoptent différentes postures.
Dominique Bucheton nous offre ainsi une grille de lecture de la classe et des postures des élèves et de l'enseignant. Du côté de ce dernier, une typologie de posture est établie : posture de contrôle, de contre-etayage, d'accompagnement, d'enseignement, de lâcher-prise, du "magicien". Comment navigue un enseignant à travers ces différentes postures ? Quelle est la "richesse" de son "jeu" ou quel est son panel d'action ?
Et pourquoi ne pas transférer cette typologie au formateur lui-même lors d'un travail d'accompagnement ou sur une action de formation ? Il me semble qu'un "jeune" formateur, dans le sens "débutant", est parfois semblable à certains "jeunes" enseignants, à la recherche d'un contrôle permanent de la situation. Or, la posture du "lâcher-prise" est aussi intéressante à mettre en place en classe que sur une action de formation, en responsabilisant chaque acteur sur ses apprentissages.
Pour le référentiel du formateur : accompagner l’individu et le collectif
L'accompagnement professionnel des jeunes enseignants , Jean-Louis Lamaurelle, Thierry Gervais et Hélène Lapeyère
Les auteurs : Jean-Louis Lamaurelle est chargé de mission formation continue en Dordogne. Hélène Lapeyrère est inspectrice de l'Education nationale. Thierry Gervais a été conseiller pédagogique. Il s'est spécialisé dans l'accompagnement des professeurs stagiaires et dans l'aide des candidats au CAFIPEMF.
L'ouvrage : c'est probablement le premier livre que j'ai lu en vue du CAFIPEMF. Il met en avant l'accompagnement des jeunes enseignants, leurs difficultés et leurs stratégies classiques. Du côté du formateur, que doit-il observer, comment réagir face à ce qu'il a observé ? Comment mener un entretien ? Cet ouvrage donne des conseils très pratiques et utiles et fait de lui un "indispensable" pour le futur formateur.
Pour le référentiel du formateur : accompagner l’individu et le collectif
Quelques citations :
> une fonction initiatique : celle qui permet d’intégrer plus facilement la culture interne à l’Education nationale;
> une fonction domestique : celle qui fera trouver auprès de vous le coup de main, le coup de pouce;
> une fonction didactique : celle qui permettra de trouver une ressource professionnelle sous forme d’étayage, de guidage;
> une fonction de décollement : celle qui devra permettre à terme la mise en cause des pratiques sans que soient remises profondément en cause les personnes.
Former les enseignants - Pour un développement professionnel fondé sur les pratiques de classe , Luc Ria
L'auteur : Luc Ria est admistrateur de l'IFE et porteur de la chaire UNESCO "Former les enseignants au XXIe siècle". Dans cet article, c'est le seul livre que je n'ai pas lu. Néanmoins, je pense important de le conseiller vu les fonctions de l'auteur. J'en profite pour conseiller aux futurs formateurs de passer du temps sur le site de l'IFE dont les ressources sont particulièrement riches.
Pour le référentiel du formateur : accompagner l’individu et le collectif
Pour finir, un texte Traduction d’un texte de Kierkegaard traduit par Britt-Mari Barth (in Le savoir en construction)
à accompagner un être vers un but précis,
je dois le chercher là où il est
et commencer là, justement là.
Celui qui ne sait faire cela, se trompe lui-même
quand il pense pouvoir aider les autres.
Pour aider un être,
je dois certainement comprendre plus que lui,
mais d’abord comprendre ce qu’il comprend.
Si je n’y parviens pas,
il ne sert à rien
que je sois plus capable et plus savant que lui.
Si je désire avant tout montrer
ce que je sais,
c’est parce que je suis orgueilleux
et cherche à être admiré de l’autre
plutôt que de l’aider.
Tout soutien commence avec humilité
devant celui que je veux accompagner;
et c’est pourquoi je dois comprendre
qu’aider
n’est pas vouloir maîtriser
mais vouloir servir.
Si je n’y arrive pas,
je ne puis aider l’autre.